« Nous devons adapter notre stratégie Horizon 2027 à cause de l’inflation », Stéphane Michel, Cérèsia
Par Stéphanie Ayrault | Le | Conseil & distribution
La coopérative Cérèsia adapte sa stratégie Horizon 2027 avec un plan d’économies de 8,9 M€ par an jusqu’en 2027. Parmi les mesures engagées : restructuration des régions commerciales, optimisation du réseau de stockage et simplification de la gouvernance. La coopérative poursuit toutefois l’accompagnement de ses adhérents dans la transition agroécologique, avec un engagement de 100 % d’ici 2027, et s’engage dans l’économie de la fonctionnalité. Explications avec Stéphane Michel, directeur de Cérèsia.

Quels sont les principaux enseignements financiers de l’exercice 2023-2024 pour Cérèsia ?
Notre chiffre d’affaires est passé de 925 M€ en 2022-2023 à 734 M€ en 2023-2024. Ce recul est principalement dû à l’évolution à la baisse des prix des céréales et des engrais, qui ont fortement chuté. À titre d’exemple, le prix pour certains engrais est passé de 800 à 1 000 euros la tonne à seulement 300 euros en moyenne sur le dernier exercice, une variation considérable. Ces fluctuations impactent directement nos revenus, même si notre collecte est restée stable, avec 1,71 million de tonnes collectées contre 1,69 Mt en 2022-2023. L’activité appro, de son côté, a légèrement progressé. C’est un exercice en recul par rapport aux précédents, mais qui reste à l’équilibre dans un contexte marqué par la poursuite de l’inflation.
Le contexte a également été très compliqué pour nos adhérents. Il a commencé à pleuvoir en octobre 2023 et cela s’est arrêté en octobre 2024. Ces conditions climatiques extrêmes, combinées à une forte baisse des prix des céréales, ont rendu la production particulièrement difficile. Il a fallu trouver des solutions adaptées pour continuer à accompagner nos agriculteurs dans ces circonstances inédites.
Quels impacts anticipez-vous pour l’exercice 2024-2025 ?
Les effets de l’inflation sont désormais structurellement ancrés dans notre compte de résultat.
L’exercice 2024-2025 sera fortement impacté par la très mauvaise moisson 2024. Nous nous attendons à une collecte en recul de 30 % par rapport à notre moyenne habituelle de 1,7 million de tonnes. En amont de cette moisson, nous avions donc engagé une réflexion stratégique avec le conseil d’administration pour adapter notre feuille de route Horizon 2027, initialement définie en 2022. Notre constat est clair : les effets de l’inflation sont désormais structurellement ancrés dans notre compte de résultat, et nous ne pouvons pas espérer un retour à des niveaux précédents. Nous devons aller plus vite et plus fort pour atteindre nos objectifs financiers.
Nous réorganisons notre réseau de stockage avec la fermeture de 33 silos sur 141 sites de collecte.
Cela se traduit par un plan d’économies d’environ 8,9 M€ par an jusqu’en 2027, dont les effets se feront sentir dès 2025-2026.
Plusieurs mesures ont déjà été engagées pour l’exercice 2024-2025 :
- nous passons de cinq à trois régions commerciales,
- nous simplifions notre gouvernance en réduisant le nombre d’administrateurs de 32 à 23,
- et nous réorganisons notre réseau de stockage avec la fermeture de 33 silos sur 141 sites de collecte.
Cette réorganisation a été pensée selon une quinzaine de critères afin de minimiser l’impact sur nos adhérents. Nous sommes conscients que cela rallongera les distances pour certains, mais cet effort est indispensable pour repositionner la coopérative sur un modèle plus compétitif.
Quels sont vos axes stratégiques pour les années à venir ?
Notre feuille de route Horizon 2027 repose toujours sur trois piliers : le développement de l’activité, qui nécessite d’être compétitif et de répondre aux attentes de nos adhérents ; la poursuite de nos investissements, avec une enveloppe de 14 M€ prévue sur les prochains exercices ; et la mise en place de mesures structurelles pour générer des économies. Par ailleurs, nous avons déjà redistribué plus de 8 M€ à nos adhérents à travers notre politique commerciale, ce qui est un signe fort de notre engagement à leurs côtés.
Un autre enjeu clé est l’accompagnement de nos adhérents dans la transition agroécologique. En 2024, nous étions déjà à 52 %.
Un autre enjeu clé est l’accompagnement de nos adhérents dans la transition agroécologique. Nous visons un engagement de 100 % d’ici 2027. En 2024, nous étions déjà à 52 %, ce qui montre que la dynamique est enclenchée. Cette transition ne peut cependant pas reposer uniquement sur les exploitations agricoles : c’est le marché qui doit rémunérer cette évolution pour permettre aux agriculteurs d’investir et d’adapter leurs pratiques.
Nous avons développé trois offres carbone adaptées : Regen Connect avec Cargill, Soil Capital et Label Bas Carbone.
Dans ce cadre, nous élargissons notre gamme de produits, notamment avec des céréales bas GES. Nous avons également développé trois offres carbone adaptées : Regen Connect avec Cargill, Soil Capital et Label Bas Carbone. Nous avons initié une quatrième offre dans le cadre d’un partenariat avec BASF qui engage 500 hectares dans un programme de crédits carbone. Nous nous inscrivons pleinement dans cette démarche de transition écologique.
Sur la protection des cultures, nous innovons aussi en misant sur l’économie de la fonctionnalité. Par exemple, avec BASF et Xarvio Healthy Field, nous proposons un modèle où l’agriculteur paie un forfait en début d’année et connaît ainsi à l’avance sa charge de protection des cultures. Si l’objectif de qualité sanitaire de sa production n’est pas atteint, il bénéficie d’une indemnisation, quel que soit le nombre de traitements effectués. Ce type d’approche fonctionne bien et sécurise davantage les agriculteurs dans leur gestion des risques.