Stocker plus de carbone dans les sols : leviers agronomiques et climatiques
Le stockage de carbone dans les sols est un levier agronomique clé pour lutter contre le changement climatique, tout en améliorant la fertilité et la résilience des terres agricoles. Couvert végétal, fumier, semis direct, agroforesterie… Certaines pratiques favorisent particulièrement l’accumulation de matière organique stable. Cette fiche fait le point sur les leviers les plus efficaces pour augmenter durablement le carbone stocké dans les sols.

Pourquoi stocker du carbone dans les sols ?
Le sol est un puits de carbone majeur : il contient deux à trois fois plus de carbone que l’atmosphère. Améliorer le stockage du carbone organique dans les sols agricoles permet :
- de lutter contre le changement climatique (réduction du CO₂ atmosphérique),
- d’améliorer la fertilité et la structure des sols,
- de renforcer leur résilience face aux aléas climatiques (sécheresse, érosion…).
Principes pour augmenter le stockage de carbone
Le stockage dépend d’un bilan entre les apports (résidus, couverts, fumures) et les pertes (minéralisation, érosion). L’objectif est d’augmenter la matière organique stable, surtout sous forme d’humus, tout en limitant les pertes.
Rang | Levier | Potentiel national de stockage (MtC/an, 0-30 cm) | Commentaire |
1 | Semis direct | ~0 MtC/an | Pas de gain net sur tout le profil de sol. Effets GES globalement positifs mais pas via le C stocké. |
2 | Substitution fauche → pâturage | 0,09 MtC/an | Stockage modeste. Effets bénéfiques GES par restitution via déjections. |
3 | Intensification modérée prairies extensives | 0,11 MtC/an | Gain annulé par émissions accrues de N₂O. Pas recommandé pour le climat. |
4 | Nouvelles ressources organiques (biodéchets, etc.) | 0,08 MtC/an (0-30 cm) → jusqu’à 1,34 MtC/an potentiel théorique brut | Faible stockage en sol car ressources déjà partiellement valorisées. Intérêt surtout GES si bien valorisé. |
5 | Développement des haies | 0,3 MtC/an (sol) + effet fort en biomasse ligneuse | Intérêt GES global important. Stockage dans le bois + substitution énergie/bois. |
6 | Agroforesterie | 1,09 MtC/an (sol) | Fort effet aussi via biomasse aérienne. Bénéfices GES majeurs. |
7 | Enherbement des vignobles | 0,58 MtC/an | Effet stockage comparable à PT, avec bon rapport coût/bénéfice. |
8 | Insertion de prairies temporaires | 1,57 MtC/an | Très bon levier, en particulier en remplacement de cultures à faible restitution. |
9 | Cultures intermédiaires (CI) | 4,43 MtC/an | Levier le plus puissant à l’échelle nationale. 36 % du potentiel total (0-30 cm). Faible coût, effet net GES très positif. |
Conseils pour maximiser l’effet
- Favoriser la biomasse racinaire : les racines laissent plus de carbone stable que les parties aériennes.
- Privilégier les apports fréquents et modérés à des apports ponctuels massifs.
- Adapter les pratiques à chaque contexte pédoclimatique : sols argileux et climats tempérés sont plus favorables au stockage.
- Éviter les pertes par érosion, tassement ou excès de travail du sol.
Le potentiel de stockage
Les estimations varient selon les pratiques et les sols, mais :
- Le programme « 4 pour 1000 » vise une augmentation annuelle de +0,4 % de carbone organique dans les 30-40 premiers centimètres de sol.
- Cela équivaut à 3 à 5 t de CO₂/ha/an stockées dans de bonnes conditions (par exemple en grandes cultures avec couverts et fumier).
1 tonne de carbone stockée = 3,67 tonnes de CO₂ évitées
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Prioriser les systèmes de cultures qui laissent les sols couverts toute l’année (intercultures, prairies longues, haies).
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Adapter les leviers au contexte pédoclimatique : plus de potentiel en zones à faibles stocks de départ (grandes cultures, sols limoneux…).
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Raisonner les pratiques dans le temps long : le stockage de carbone tend vers un plateau après 20-40 ans.
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Intégrer le stockage de carbone dans une approche multi-critères (fertilité, biodiversité, résilience, bilan GES global).
Références
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Expertise scientifique collective Inrae - Ademe, 2019
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Résumé technique “Stocker du carbone dans les sols français. Quel potentiel au regard de l’objectif 4 pour 1000 et à quel coût ?”, 2024