Séparation vente/conseil : « Tout cela devra être clarifié dans les décrets », Dominique Chargé
Par Stéphanie Ayrault | Le | Politique agroécologique
La PPL des sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a été votée dans la nuit du 27 au 28 janvier 2025. La suppression de la séparation vente/conseil, initialement prévue par la PPL, est remplacée par une « solution intermédiaire ». Réaction de Dominique Chargé, président de La Coopération agricole.

Quel est votre sentiment sur l’adoption de la PPL Duplomb-Menonville en première lecture au Sénat ?
La suppression des 3R, bien qu’elle ait été retoquée, n’était pas une demande directe de notre part.
Cela va dans le bon sens, dans celui de l’intérêt général. En l’occurrence, il s’agit ici de donner à l’agriculture les moyens de retrouver des marges de manœuvre en termes de compétitivité. Il est essentiel d’accompagner les agriculteurs dans leur stratégie de transformation de leurs modèles de production, avec une approche globale qui inclut, bien sûr, la stratégie de protection des plantes.
La suppression des 3R, bien qu’elle ait été retoquée, n’était pas une demande directe de notre part. Toutefois, c’était un levier qui aurait pu redonner de la compétitivité.
Cela dit, pour nous, l’enjeu majeur reste l’abrogation de la séparation entre la vente et le conseil. Aujourd’hui, cette séparation crée une insécurité juridique. Retrouver la capacité de proposer un conseil en approche globale est essentiel pour accompagner efficacement les agriculteurs dans leurs transitions.
Quels changements apporte-t-elle sur la séparation de la vente et des produits phytosanitaires ?
D’après ce que je comprends du texte tel qu’il est sorti du Sénat, le conseil stratégique, qui était obligatoire tous les cinq ans, notamment pour l’obtention du certiphyto, pourrait devenir facultatif. De plus, il serait désormais possible pour les distributeurs de produits phytosanitaires de proposer ce conseil stratégique, sous certaines conditions, qui devront être définies par décret.
Par ailleurs, le conseil spécifique, interdit pour les entreprises ayant choisi la vente de produits phytosanitaires, pourrait être supprimé, ce qui signifie qu’il n’y aurait plus de conditions restrictives pour le pratiquer.
Cependant, les metteurs en marché, à savoir les fabricants de produits phytosanitaires - et non les coopératives ni les négoces - resteraient soumis à l’interdiction de fournir du conseil ou devront continuer à maintenir leurs activités séparées.
Nous devrons également conserver les CEPP. Cela ne pose pas de problème en soi, puisque c’est une démarche de progrès ancrée dans les coopératives, à condition d’avoir suffisamment de fiches-actions disponibles pour les mettre en œuvre. Il est important que le processus de validation des CEPP s’accélère.
Que souhaitez-vous désormais ?
Tout cela devra être clarifié dans les décrets à venir. Bien que la capacité à offrir un conseil global soit une avancée importante, notamment pour appuyer les transitions agricoles, nous devons être vigilants sur les décrets pour éviter de nouveaux freins ou contraintes et que les règles définies ne viennent pas entraver l’opérationnalité ni créer de restrictions inutiles, notamment concernant les conflits d’intérêts.
Nous soutenons par ailleurs l’inscription de ces dispositions dans la loi. Aujourd’hui, notre priorité est que ce texte soit inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans les plus brefs délais. Idéalement, cela devrait se faire avant le Salon de l’Agriculture afin qu’il puisse faire l’objet d’un examen rapide et être appliqué le plus tôt possible. Cela fait plus de quatre ans que nous attendons ce texte.
« LCA appelle les députés à poursuivre cet élan en transformant l’essai »
La Coopération Agricole salue l’adoption par le Sénat de la proposition de loi visant à lever les contraintes pesant sur le métier d’agriculteur et appelle les députés à poursuivre cet élan en transformant l’essai, indique-t-elle le 30/01/2025
Parmi les mesures clés adoptées, La Coopération Agricole note :
• La réforme du dispositif complexe et inefficace de la séparation de la vente et du conseil de produits phytopharmaceutiques ainsi que la création d’un conseil stratégique global pour mieux accompagner les agriculteurs dans les transitions.
• L’autorisation exceptionnelle et sous conditions de l’usage de certains produits phytopharmaceutiques à base de néonicotinoïdes autorisés au sein de l’Union européenne, pour les filières confrontées à des impasses techniques.
• La reconnaissance d’intérêt général majeur pour les ouvrages de stockage d’eau et les prélèvements associés à finalité agricole.