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WWF émet des recommandations pour une méthanisation plus durable


WWF émet des recommandations pour une méthanisation plus durable
WWF émet des recommandations pour une méthanisation plus durable

La méthanisation se développe en France et les projets portent de forts enjeux d’intégration environnementale et territoriale. Pour accompagner ce déploiement, WWF France a publié le 17 mars un rapport qui identifie les conditions de durabilité de la méthanisation agricole en France. L’ONG veut en effet s’assurer que la filière « contribue efficacement à la transition vers un modèle de production agroécologique, pérenne sur le plan économique et aux performances environnementales améliorées ».

Cive et digestats

Le rapport est le fruit de travaux menés pendant un an avec GRDF. Les deux acteurs ont réuni les instituts de recherche, les acteurs institutionnels, les représentants du monde agricole et de la filière biométhane et des associations au sein d’ateliers. Le travail a ciblé plus particulièrement deux enjeux : les cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) et le retour au sol des digestats.

Pour les Cive, les partenaires se sont fondés sur les travaux de recherche et les diverses expérimentations qui ont permis d’identifier des facteurs clés comme le choix des semences, l’intégration dans les rotations, ou encore les pratiques de fertilisation. « Il faut être vigilant à ce que la recherche de production de biomasse ne conduise pas à une fertilisation inadaptée des Cive, qui enrichirait les milieux en azote, annihilant les services de gestion de l’azote que les Cive permettent », insiste WWF. Les Cive ont toutefois plus d’un atout en poche, selon l’ONG : elles contribuent à stocker du carbone dans les sols et au maintien de la diversité paysagère agricole, à condition de bien choisir les espèces. L’impact sur la biodiversité est à l’étude dans le cadre du programme Agrifaune, mis en place par les fédérations des chasseurs, les chambres d’agricultures et la FNSEA.

Un cadre réglementaire pour assurer la sécurité alimentaire

Si ces cultures contribuent aussi à diversifier le revenu des agriculteurs, elles posent la question de la sécurité alimentaire : les Cive ne doivent pas concurrencer les usages pour l’alimentation animale ou humaine, ni nuire à la productivité des cultures suivantes. Dans ce cadre, WWF demande de clarifier la définition des Cive d’un point de vue réglementaire « pour que leur culture ne se fasse pas à l’encontre des usages prioritaires des terres agricoles et de leur résilience ».

Quid des digestats ? Chaque tonne de déchets méthanisée permet de produire en moyenne 930 kg de digestats valorisés pour l’essentiel par épandage sur des parcelles agricoles. Leurs caractéristiques sont fortement influencées par la qualité des déchets et des matières entrantes dans les unités de méthanisation, par les conditions du procédé et de post-traitements éventuels, ainsi que par la technique d’épandage. « Si bien qu’il n’y a pas un digestat mais des digestats », analyse WWF qui reconnaît que leur usage permet des économies de 20 % en moyenne sur les achats d’engrais de synthèse. Un des points de vigilance relevé est le risque de volatilisation de l’ammoniac : l’association insiste sur la couverture étanche des espaces de stockage et sur le choix du matériel d’épandage. Elle recommande également l’usage de l’agriculture de précision pour éviter la pollution des eaux par les nitrates et les phosphates. La gestion des digestats peut être source d’émissions de protoxyde d’azote et de méthane, et peuvent avoir des effets sur la biodiversité des sols, alerte WWF. L’association estime que des travaux de recherche et des expérimentations doivent être menés afin d’approfondir la connaissance des impacts sur l’activité biologique des sols et identifier les pratiques durables associées.

Intégration dans les territoires

WWF France propose également d’évaluer les projets selon une grille de lecture sous le prisme de trois critères :

  • La mise en œuvre de pratiques agroécologiques, en s’assurant de la protection des sols, de l’air, de l’eau et de la biodiversité.
  • L’intégration au contexte territorial avec des réflexions sur les flux de biomasse et la concurrence d’usage, la gouvernance locale, l’appropriation sociétale et la création de valeur partagée.
  • La contribution à la résolution des défis sociétaux globaux en permettant d’atteindre les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la résilience des systèmes agricoles.

« Un appui à la montée en compétence des acteurs de la filière est essentiel pour garantir que la méthanisation ne perturbe pas le fonctionnement des agro-écosystèmes », estime toutefois WWF. Les chambres d’agriculture doivent jouer un rôle central.

WWF insiste sur la nécessité d’avoir une vision partagée de ces conditions de durabilité avec tous les acteurs. Elle demande de créer un cadre de référence commun.